En 2013, Mourad Laachraoui fait son entrée dans le taekwondo de haut niveau et intègre le Centre d’Entraînement de la fédération. En 2016, il devient Champion d’Europe dans la catégorie des -54Kg et entre au Panthéon du taekwondo belge et francophone. Aujourd’hui, à 25 ans, Mourad a choisi de mettre un terme à sa carrière de Sportif de haut niveau pour se former au métier d’entraîneur. Il est en formation au sein du staff de l’ABFT Team où il occupe la fonction d’entraîneur adjoint. À cette occasion, Mourad revient avec nous sur son parcours et nous parle de ses projets.
Bonjour Mourad. Tu es encore jeune, avec un beau potentiel de progression.
Qu’est-ce qui motive ta décision de mettre un terme à ta carrière d’athlète ?
Cela a été une décision très difficile à prendre car le Taekwondo et ma carrière de Sportif de haut niveau ont fortement contribué et contribuent toujours à mon développement personnel et professionnel.
Cette décision émane d’une profonde introspection, durant laquelle j’ai réalisé que mon sentiment d’épanouissement, qui a souvent été très grand tout au long de cette carrière, commençait à tendre vers le bas. Cela est partiellement dû à des récentes blessures, à des périodes de revalidation prolongées, à un sentiment de devoir accompli, ou à un mélange de ces éléments.
En tout cas, j’ai pris cette décision sans rancune, ni regret. Je garderai un souvenir mémorable de mon aventure dans le haut niveau.
Quel est le meilleur souvenir de ta carrière sur le plan sportif ? Et sur le plan humain ?
Ce que je retiendrai principalement de cette carrière sportive, c’est l’opportunité de voyager à travers le monde, de découvrir de nouvelles cultures et rencontrer de nouvelles personnes.
Quand j’étais plus jeune, lors d’un cours d’Anglais, la professeure s’était arrêtée sur une expression idiomatique : « travels broaden the mind », ce qui signifie « les voyages forment la jeunesse ».
À l’époque, je n’y avais pas prêté une attention particulière. Aujourd’hui, je suis pleinement convaincu que les voyages que j’ai pu réaliser tout au long de ma carrière ont joué un grand rôle dans mon développement personnel et humain.
Sur les plans sportif et humain, mon meilleur souvenir restera sans aucun doute celui de ma médaille d’or au Championnat d’Europe 2016 à Montreux. Une victoire remportée à la suite d’évènements qui ont fortement perturbé la société belge et qui m’ont profondément marqué. Cette médaille est venue remettre de l’ordre dans ma vie personnelle et professionnelle.
Tu suis des études en parallèle de ta carrière sportive, c’est bien ça ? Dans quel domaine ?
Oui effectivement, je suis en dernière année d’étude d’ingénieur en électromécanique.
En quoi ton parcours universitaire a-t-il pu t’aider dans ta carrière sportive ? Et vice versa ?
Mes parents ont toujours priorisé les études avant le sport. Du coup je n’avais pas vraiment le choix à ce niveau-là : pour continuer le sport, il fallait que je réussisse mes études.
Mes parents ne m’ont donc pas simplement motivé à faire des études, ils m’ont surtout poussé à les réussir à l’aide d’un enseignement majeur qu’est la discipline.
Je dirais que la discipline est une aptitude commune à la réussite des 2 projets.
Une aptitude que l’on m’a inculquée au sein de ma famille, que j’ai renforcée lors de mes études et développée au cours de ma carrière dans le haut niveau. J’ai pu ensuite la transposer et la développer jour après jour dans mon quotidien d’étudiant/Sportif de haut niveau.
Quels « transferts » as-tu pu effectuer entre les deux carrières ?
Ayant un style de combat basé davantage sur l’analyse que sur les performances physiques (force, vitesse, endurance, …), je suis convaincu que mon cursus scolaire m’a beaucoup apporté dans ma carrière.
Beaucoup pensent qu’il faut sacrifier une carrière dans le haut niveau au profit d’études supérieures, ou inversement. Or, pourquoi ne pas mettre les éléments de l’un au service du développement de l’autre ? Je suis convaincu que mon parcours scolaire a énormément contribué à mon palmarès sportif.
Tu as rejoint le staff de l’ABFT Team depuis quelques semaines, quelles sont tes premières impressions ?
En plus des formations Adeps et ABFT que j’ai suivies et suis toujours, Éric Maréchal (Directeur technique) et Leonardo Gambluch (Entraîneur national) m’ont proposé d’intégrer le staff pour parfaire ma formation et partager mon expérience du haut niveau avec les Juniors du Centre d’Entraînement.
Il s’agit d’une vraie opportunité pour moi de travailler au sein de la fédération qui m’a vu grandir et sans laquelle je n’aurais pas pu réaliser tout ce que j’ai accompli.
Cela va faire maintenant quelques semaines que je suis passé « de l’autre côté » et que je m’occupe des plus jeunes. Je suis à nouveau pleinement épanoui dans ce que je fais. Ce sentiment me conforte chaque jour un peu plus dans mon choix d’arrêter ma carrière de Sportif de haut niveau.
D’un autre côté, je me rends compte de la charge de travail et de la fatigue qu’impliquent le métier d’entraîneur. Les journées sont pleines entre les réunions, la préparation des entrainements et l’énergie qu’il faut mettre dans ces derniers.
Comment vois-tu l’avenir du Taekwondo belge ?
Après une ascension fulgurante en 2015 avec les titres de Champion du monde de Jaouad Achab et vice-Champion du monde de Si Mohamed Ketbi, les porte-drapeaux de notre discipline, je pense que le Taekwondo belge a encore de très beaux jours devant lui. En plus de Jaouad et Si Mohamed, le Taekwondo belge peut compter des athlètes comme Badr Achab, Indra Craen, Raheleh Asemani ou Nicolas Corten. Sans bien sûr oublier une plus jeune génération qui est impatiente de rentrer dans la cour des grands et de rendre mon titre de Champion d’Europe anecdotique dans l’histoire du Taekwondo belge. C’est tout ce que je souhaite en tout cas.
Quels sont tes projets pour la suite ?
Des projets, j’en ai beaucoup ! À court-terme, il s’agit de terminer mes études supérieures et de continuer à me former en tant qu’entraineur.
Je souhaite contribuer au développement du taekwondo belge, pour tout ce qu’il m’a apporté dans la vie.
Un dernier mot ?
Je souhaite remercier ma fédération sportive, l’ABFT, mon Président, Abdelhak Boubouh, mon Directeur technique, Éric Marechal, ainsi que tout le personnel de l’ABFT qui m’ont permis de pratiquer mon sport dans les meilleures conditions possibles.
Je veux aussi remercier mes entraîneurs, Leonardo Gambluch et Abdelkhalak Mkadmi, qui m’ont permis de progresser et de décrocher toutes ces médailles, de la première dans le haut niveau à l’Open des Pays-bas 2013 avec Abdel à mes côtés, jusqu’à aujourd’hui, en passant par mon titre de Champion d’Europe obtenu avec Leonardo Gambluch.
J’aimerais également remercier l’ADEPS, mon employeur, qui m’a permis de combiner mes carrières sportive et académique de manière optimale.
Je tiens à remercier tous mes partenaires d’entraînement, dans mon club du Brussels Taekwondo Team, au sein de l’équipe fédérale et dans tous les clubs qui m’ont accueilli pour pouvoir échanger.
Enfin, mention spéciale pour mon “frère” et principal partenaire d’entraînement, Si Mohamed Ketbi, qui m’a poussé à me dépasser tout au long de ma carrière.
Mourad, tu as l’élégance des grands. Toute la fédération te remercie pour ta très belle carrière de champion et tes valeurs qui font de toi une belle personne. Nul doute que tu transmettras ton expérience et tes valeurs à ton équipe. Nous te souhaitons bon voyage dans cette nouvelle fonction et beaucoup de succès.